Les Choses de la vie
Georges a vu une main bouger.
L’embardée de la voiture avait été spectaculaire, et il y avait peu de chances qu’il y ait des survivants. Tout s’était passé très vite, si vite, un coup de volant malencontreux, un chauffeur assoupi, peut-être un peu de tout ça, ou alors l’alcool, ou la trop grande vitesse… La grosse berline a commencé à partir sur la droite de la route, puis sur la gauche, avant de rencontrer le parapet et s’enrouler sur elle-même dans un tonnerre de tonneaux et de tôle froissée. Combien était-il, dans ce cercueil roulant ? Nul ne le sait, mais ce qui est certain, c’est que les gars de la DDE allaient avoir du mal à ravoir le bitume ! L’accident s’est déroulé au milieu de la nuit, et Georges était le seul à parvenir sur les lieux du sinistre.
Il arrêta sa voiture non loin de la compression de César, qui fumait et sentait le sang et l’huile. Il s’approcha, non sans appréhension, de la carcasse – qu’allait-il découvrir ? Des membres ensanglantés ? Des cervelles explosées ? Alors qu’il tentait de se frayer avec la main un passage à travers la carrosserie, son œil s’écarquilla : il a vu une main bouger. Une main ! Y avait-il encore quelqu’un de vivant là-dedans ? Il essaya de dégager les morceaux de tôle. Son regard fut attiré par quelque chose de brillant. Il le retira de la voiture en fusion :
Allons bon, c’est quoi ce bidule encore ? Il jeta dédaigneusement l’objet à terre, et là il se passa quelque chose d’incroyable : une silhouette émergea de la carrosserie. Enfin, une silhouette… Disons un ersatz d’être humain qu’on aurait dit blond, dont un sein pendouillait négligemment et qui visiblement, irait claquer pas mal d’argent pour se refaire faire le visage, tellement ravagé qu’il était par l’accident.
La chose se mit en branle, marchant maladroitement vers Georges. Elle lui jeta un regard violemment fiévreux et lui lança : “Mais quoi, tu peux pas faire gaffe, merde, un Guccissima pour mon iPod, ça se respecte !“. Georges n’en crût pas ses oreilles. Il retourna vers sa voiture, perçut une insulte provenant de la chose (“péquenot !“), passa la première et défonça la gueule de l’impétrante. Ah mais, c’est qu’il faut pas lui marcher sur les burnes, au Georges.
