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Réactions à la lettre de Steve Jobs

Boro

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La lettre ouverte de Steve Jobs à tous les acteurs du monde de la vente de la musique en ligne a fait réagir de nombreuses personnes.

– Les principaux intéressés, les majors, n’ont pas souhaité répondre officiellement. Mais officieusement, certains responsables évoquent la possibilité de tester d’autres formes de protection de la musique. Pas question, en tout cas pour le moment, de supprimer purement et simplement les DRM.

– En Norvège, pays qui menace Apple depuis maintenant plusieurs mois, on est satisfait de la prise de position d’Apple par la voix de son patron Steve Jobs, mais on reste inflexible sur le principe : peu importe combien de sociétés utilisent le système des DRM propriétaires aux côtés de l’iTunes Store, les méthodes restent illégales. Les menaces de poursuites judiciaires sont donc toujours d’actualité alors que l’Italie à rejoint la Norvège aux côtés du Danemark, de la Suède, de la Finlande, de l’Allemagne et de la France.

– Aux États-Unis, après que Bill Gates ait convenu il y a quelques semaines que les DRM n’étaient pas une bonne chose pour les consommateurs, Jason Reindorp, responsable du marketing pour le Zune chez Microsoft déclare que la proposition de Jobs de supprimer les DRM était au mieux naïve, au pire irresponsable. Probablement que l’échec du Zune échauffe les esprit du côté de Redmond qui comptait peut-être sur le modèle de l’iTS pour capturer des clients dans le système du Zune.

En ce qui concerne la France, les réactions recoupent sans surprises les clivages qui s’étaient dessinés ces derniers mois, avant de se cristalliser autour de la discussion de la loi DADVSI :

– Dans un communiqué, Fnacmusic se contente de rappeler qu’elle avait dénoncé les systèmes propriétaires, et appelé à l’interopérabilité sur la musique numérique, rappelant au passage qu’elle a lancé le 17 janvier dernier un catalogue de 17 000 titres au format MP3 avant de se féliciter qu’Apple soit aujourd”hui dans cette position.
Ce à quoi on peut rappeler que ledit catalogue est puisé aux labels indépendants, et qu’il reste en vente chez Fnacmusic plus d’1 million de titres de la base des Majors toujours verrouillés.

– Chez VirginMega, Julien Ulrich considère que la prise de position de Steve Jobs est une grande victoire pour l’industrie et les consommateurs. Pour le directeur général de la société, après la ralliement des indépendants, il ne reste plus qu’à convaincre les majors du disque, ce qui on le verra plus bas ne risque pas d’être chose facile. Le concurrent malheureux de l’iTunes Store ne se prive pas de souligner combien il est plus facile de faire ce type de proposition lorsque l’on occupe une place dominante sur le marché des baladeurs, et qu’en outre les différentes procédures ou législations en marche en Europe avaient pu jouer un rôle déterminant. Tout comme Fnacmusic, Virginmega s’est égament lancé dans la vente de musique sans verrous, largement issue du catalogue “Indé”.

– Pour Jérôme Roger, directeur général de la Société civile des producteurs de phonogrammes en France (SCPPF), principal représentant des producteurs indépendants, la position prise par Jobs va dans le bon sens, et le Français reprend à son compte l’essentiel de l’argumentation développée par le Californien, avant de prédire un mouvement important dans ce sens… et de promettre la vigilance quant à l’acceptation de titres proposés par les labels indés débarrassés des DRM, sur l’iTunes Store.

– Ce n’est évidemment pas le même son de cloche qui est rendu par Hervé Rony, le directeur général du Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP) qui représente lui l’ensemble des producteurs et au premier chef les Majors. Celui-ci n’a pas de mots assez durs pour condamner l’initiative, assimilant le renoncement aux DRMs à la démonstration “de sa part un mépris et une indifférence pour le monde de la musique et de la création.” avant d’en appeler à plusieurs reprises au bouclier protecteur de la loi DADVSI, dans une intervention assez contradictoire qui semble surtout avour été dictée par la panique.

– Pour Julien Dourgon qui connaît bien le dossier qu’il suit pour l’UFC-QueChoisir, c’est l’occasion de demander au ministre de la Culture de prendre position sur le sujet, et de peser de son autorité pour peser sur les Majors afin que celles-ci renoncent aux DRMs, non sans dénoncer le “piège” qu’avait constitué la loi pour les consommateurs.
Si l’on considère qu’icelle avait été d’abord été conçue comme un cadeau aux Majors, afin de sanctuariser les DRMs, on voit mal comment le ministre pourrait bouger à présent sur ce point, sauf évidemment à manger son chapeau et à se livrer à un bel exercice de palinodie en cette période pré-électorale.

– Paradoxalement, Thibaut François, cofondateur du collectif StopDRM, oppose une fin de non-recevoir à la proposition de Jobs à l’industrie d’abandonner définitivement les fameux DRMs, se contentant d’y voir une posture du type « Faites ce que je dis, mais ne faites pas ce que je fais ». Et de poursuivre interrogé par 01 : « Cette annonce est pour nous une victoire , surtout de la part de quelqu’un comme Steve Jobs, dont la société est tout de même, dans les faits, le premier fournisseur de DRM au monde sur la musique en ligne. Mais nous ne sommes pas dupes. Tout cela relève avant tout de l’opération de communication. »
Position nettement plus idéologique et qui tranche avec les réactions nettement plus mesurées citées plus haut, et qui au moins intègrent le fait que pour vendre de la musique en ligne, Apple a dû signer des contrats avec les Majors et en passer par leur volonté de cadenasser leur production.

– Quant aux réactions de Renaud Donnedieu de Vabres, l’ineffable ministre de la Culture, celles-ci se contentent sans surprise de reprendre ses vieilles scies sur l’interopérabilité, sans répondre sur le fond ni même à l’interpellation de l’UFC-QueChoisir. Les représentants des quatre Majors du disque étant aux abonnés absents, sans doute le cabinet du ministre était-il bien embarrassé pour prendre une quelconque position…

– Et le panorama ne serait pas complet, si l’on ne rendait pas compte du commentaire de John Dvorak, chroniqueur américain desespérement coincé avec dix ans de retard sur Apple. Il surprend en affirmant que Steve Jobs a diablement raison à propos des DRM. Dvorak avec une opinion sensée ? Le ciel ne devrait pas tarder à nous tomber sur la tête !