MacExpo 2005 : succès à l’Olympia
La montée en puissance de Londres, et en particulier de la MacExpo a pu laisser craindre un changement stratégique rapide d’Apple en Europe. Or à court terme il n’en est probablement rien.
Bien malin celui qui peut prédire ce que fera Apple à l’échéance de quelques semaines, et bien présomptueux ou bien fou celui qui prétendrait pouvoir décrire précisément plusieurs mois à l’avance la stratégie de Cupertino… pour la bonne et simple raison que celle-ci est faite pour une bonne part d’un savant mélange d’adaptation aux circonstances et d’une diabolique habileté manœuvrière… Dans ces conditions, la crainte de voir Apple déserter le marché français et passer le Channel avec armes et bagages, après avoir enterré l’Apple Expo, sont donc au minimum “largement prématurées”. Malgré le succès de l’édition 2005 de la MacExpo,
les éléments du premier bilan tiré Outre-Manche peuvent même laisser penser le contraire…
Les chiffres donnés par XPO Events l’organisateur, s’ils n’atteignent pas encore ceux de l’Apple Expo qui cette année encore accueillait un peu plus de 55 000 visiteurs uniques, (soit environ 70 000 visites si l’on compte les récidivistes) et plus de 250 exposants, ont tout de même de quoi faire plaisir : 185 “marques exposantes” (environ +20%), réparties sur 102 stands (+20% environ aussi), ce qui avait été rendu possible par 25% de surface au sol supplémentaire offerte par l’Olympia Exhibition Centre, par rapport au Business Design Centre de l’an passé. Un beau succès pour cette cuvée, si l’on considère que la manifestation n’a que 3 ans d’âge… à ceci près que ce que l’article un tantinet triomphal de Macworld UK ne dit pas, c’est que si le chiffre avancé de 25 000 visiteurs est bon, celui-ci est rigoureusement le même par rapport à l’année dernière, malgré un emplacement plus favorable.
Les mauvaises langues diront que non seulement c’est le cas pour Paris, mais qu’en plus on ne s’y est pas donné la peine de communiquer des résultats, ce qui est vrai. Mais ce n’est donc plus tant la France qui recule, sur fond de pathos et de déclin national, ou Apple elle-même qui n’avance pas… que ces grandes manifestations qui atteignent leurs limites.
L’édition 2005 de l’Apple Expo avait certes été particulière, avec le forfait de dernière minute du charismatique Steve Jobs de la Keynote, et l’absence cruelle d’annonces matérielles qui ont sans aucun doute pesé sur l’enthousiasme… et la fréquentation. Les principales annonces ont été faites soit avant, soit après pour des raisons de disponibilités industrielles si l’on en croit AppleInsider, la mise à disposition de .mac en français et allemand faisait certes un peu chiche, au point que certains habitués ont pu parler de “nano Expo”… et de rappeler ainsi la fameuse blague de Woody Allen, dans ‘Annie Hall‘, où deux vieilles dames se plaignent au restaurant, et qui marque toute notre ambiguïté : “C’est vraiment pas bon”, dit l’une. “Oui, et il n’y en a vraiment pas beaucoup…”. Or c’est exactement la même vanne de la “nano Expo” qui a circulé dans les allées, à Londres cette fois…
Il est vrai que l’expression n’était pas tout à fait utilisée dans le même contexte : les anglais qui avaient fait le déplacement de la Mac Expo trouvaient le stand Apple trop petit. Si l’on en croit toujours Macworld UK, c’est sur instruction de Cupertino qu’Apple aurait revu à la baisse la taille de son stand, par rapport à ce qui était semble-t-il initialement prévu. Il n’est en effet pas dans l’intérêt d’Apple de favoriser l’une ou l’autre des rives de la Manche, et surtout pas de paraître se désintéresser de sa tête de pont historique en Europe.
On connaît bien les raisons qui ont fait craindre un déménagement pur et simple du siège d’Apple Europe des Ulis vers les bords de la Tamise : le dynamisme plus important du marché anglais, et de sa société en général, l’accueil très favorable reçu par l’iPod et par l’iTunes Music Store, dans un pays qui a depuis la 2e moitié du XXe siècle culturellement davantage de points communs avec les États-Unis qu’avec l’Europe continentale. Il s’agit surtout d’un pays où la création artistique et musicale est foisonnante, conclusions auxquelles Pascal Cagni, le vice président d’Apple pour l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient, et son équipe ont tiré les conséquences en venant s’installer ou en partageant pour moitié leur temps avec l’Angleterre. On citera aussi l’absence de barrière de la langue, et même l’amitié qui lie Steve Jobs et Jonathan Ive, autour de leur passion commune pour le design.
Qu’on le veuille ou non, l’installation d’un AppleStore à Londres avant Paris correspondait à des critères de disponibilité des emplacements… et de la dynamique de l’iPod. Mais a contrario, la Pomme ne peut désinvestir Paris et le continent, tout d’abord parce qu’elle ne peut se retirer sans faire une croix sur le marché de la 2e ou 3e économie de l’Union Européenne. Impensable, surtout lorsqu’on sait qu’Apple France conserve certains points forts historiques bien au delà de ses résultats généraux. A titre d’exemple, avec 18% le secteur de l’Éducation fait bien mieux dans l’hexagone en termes de parts de marché que son homologue britannique. Le ‘Small to Medium Business‘, secteur Santé y compris, se porte plutôt bien lui aussi.
On ne gagne pas une bataille en abandonnant le terrain, et Steve Jobs qui a multiplié les clins d’œil en direction de la France lors des 2 Apple Events qui ont suivi et précédé l’Apple Expo le sait plus que tout autre. On a dit ici à plusieurs reprise qu’à Cupertino on semblait s’orienter vers un mode de communication différent. Il faut sans doute s’attendre à voir émerger un style de management des différentes filiales moins centralisé, et davantage respectueux des équipes et de leurs particularités. Du moins le temps pour elles de faire la preuve de leur efficacité. Apple France ne vivra peut-être pas à l’heure de Greenwitch avant un petit moment…