—Le retour du fils de la riposte… (graduée) —
Élaborés sous la houlette du P-DG de la Fnac Denis Olivennes, les travaux de la commission éponyme ont été remis vendredi sous les ors de la République, en présence de Nicolas Sarkozy, et ses conclusions ont donné lieu à des accords tripartites entre les industriels du divertissement, les fournisseurs d’accès et les pouvoirs publics qualifiés d’ “historiques”, et baptisés dans la foulée “Accords de l’Élysée”. Mais même présentées en grande pompe, les mesures adoptées n’en font pas moins figure pour beaucoup de loi DADVSI au petit pied.
Où sont donc les débats passionnés auxquels avait donné lieu la loi DADVSI ?
“ Si vous voulez enterrer un dossier, créez une commission ” dit l’adage parlementaire. Menées tambour battant et bouclées en moins de 3 mois, les consultations et les propositions auxquelles celles-ci ont donné lieu n’ont guère permis en revanche une appropriation générale. Il faut dire que la composition de la commission – un ingénieur général des télécommunication, un très orthodoxe professeur d’économie et chercheur aux Mines et une conseillère d’État également membre du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique – ne risquait guère de la rendre vulnérable à des fuites ou des empoignades sur la place publique. Quant à son président, si l’on a beaucoup insisté sur sa qualité de P-DG du premier disquaire et libraire de France, celui-ci est également passé entre autres par l’ENA et à la Cour de Comptes. Dans ces conditions, il faut bien avouer que la commission Olivennes était bien peu susceptible de donner lieu à des fantaisies…
C’est donc fort logiquement que les accords signés à l’Élysée sur cette base entre industriels du multimédia et des télécoms ont repris l’essentiel du catalogue des desiderata de ceux qu’il est convenu d’appeler les “ayants droit” – le public et les “ consommateurs ” n’ayant sans doute que celui de payer et de se taire ? : mise en place d’une riposte graduée pourtant retoquée par le Conseil Constitutionnel, placé sous l’égide d’une autorité administrative elle-même sous l’autorité d’un juge et à même de délivrer des avertissements, voire de prononcer des sanctions pouvant aller jusqu’à la résiliation et l’interdiction d’abonnement pour les récidivistes… “petits téléchargeurs”. Moyennant quoi, les industriels du contenu ont accepté du bout des lèvres, qui d’abandonner les DRM sur le catalogue français, qui de synchroniser les sorties de VOD sur celles des DVD… un an après la mise en place des mécanismes de sanction.
Autant dire que le discours patelin sur “l’éducation du public” a fait place à une rhétorique du “marti-fouette” et de la maison de redressement, et que les priorités de la lettre de mission de la Ministre de la Culture ont été quelque peu ré-ordonnancées. Ce faisant, on a oublié un axiome élémentaire qui veut que pour être efficace l’offre doit précéder la demande. Disponible vendredi et tout le week-end, le site du Ministère de la Culture consacré aux accords était inaccessible toute la journée de lundi, pour finir par être déclaré pudiquement “ en maintenance ” dans la soirée. Les soutiers de la création – toujours très largement exclus du partage – les associations de consommateurs ou d’internautes ont très largement réagi, et re-commencé à s’approprier le débat. Quelles qu’aient pu être les démonstrations de satisfaction affichées et la volonté des protagonistes de se rassurer sur le sujet autour d’un texte à l’évidence ficelé pour calmer leurs angoisses, la réalité – elle aussi – pourrait également faire retour…