Les Google-Glass ont leur code de bonne conduite
Les Google-Glass n’ont pas forcément bonne presse; les incidents concernant des utilisateurs de l’appareil se sont multipliés ces dernières semaines, de l’individu se faisant sortir d’un cinéma parce qu’il était soupçonné de pirater le film à ce restaurateur qui estime que ses clients seraient sans doute gênés de ne pas savoir s’ils sont filmés à leur insu. On ne compte déjà plus aux Etats Unis le nombre de cafés ou de lieux publics qui indiquent clairement que les lunettes interactives de Google doivent rester sagement au fond du sac, sans quoi l’entrée n’est pas autorisée.
Face à ce qui est en train de devenir un vrai problème d’image, et alors même que la sortie commerciale du produit est toujours prévue pour la fin de l’année ou le début 2015, Google préfére calmer le jeu et vient de publier un code de bonne conduite de ses Glass, dont certains passages prêtent quand même à sourire.
S’adressant aux utilisateurs de GG comme s’ils étaient de véritables explorateurs des temps modernes, Google semble surtout tenter de masquer de façon subtile ce qui devient une nécessité de rappel à l’ordre. La première partie du “code”, axée sur ce qu’il faut faire (et bien faire) avec ses Google-Glass, rappelle quelques généralités concernant le contexte d’utilisation de l’appareil mais donne aussi et surtout les cadres clairs qu’il faut respecter, comme le simple fait de demander l’autorisation lorsque l’on veut filmer un lieu où des personnes se trouvent dans le champ de vision. Plus surprenant, Google pousse aussi clairement les premiers utilisateurs de GG à faire la publicité active du produit, sur un mode viral et par effet de bouche à oreille, comme si la seule technologie présentée ne se suffisait déjà plus à elle-même.
Mais ce sont surtout les choses “à ne pas faire” qui alimentent au final un certain malaise autour du produit. Si vraiment les Google-Glass devaient s’insérer de façon naturelle dans nos sociétés modernes, pourquoi devoir rapeller à ses utilisateurs qu’il ne faut pas se comporter comme un “Glass-hole“, pourquoi expliquer de manière aussi appuyée que “si vous êtes désolé que quelqu’un interrompe un diner romantique dans un bon restaurant pour vous poser des questions sur vos lunettes (ou vous demander d’éteindre l’appareil, Ndlr), alors enlevez-les, mettez-les à l’arrière de votre cou ou dans votre sac ” ?
Le “timing” comme on dit ne semble décidément pas être le bon : entre les soucis résurgents concernant le respect de la vie privée, et qui ont pris une tout autre dimension avec l’affaire Snowden, entre le fait de se rendre compte que ce n’est pas du tout la même chose de savoir que l’on est filmé ou photographié et le fait de ne jamais en être tout à fait sûr, entre les contraintes légales et de protection du copyright, les Google-Glass tombent un peu comme un gros cheveux technologique sur la soupe.
Google est de plus parfaitement conscient qu’il ne peut pas se louper avec ses lunettes à réalitée augmentée. Un échec sur ce produit qui est éminemment le sien, sans suivre cette fois la roue d’un précurseur de type Apple, viendrait jeter le doute sur la capacité du géant à sortir de son coeur de métier pour proposer de nouveaux produits disruptifs. Les analystes ont pu trouver milles excuses à l’échec du rachat de Motorola, mais ils n’en trouveraient sans doute plus aucune à un produit aussi stratégique et sur lequel Google communique depuis plusieurs trimestres. Google agit en fait comme s’il se sentait déjà un peu piégé avec cette technologie qui arrive sans doute un peu trop tôt : les effets d’annonces autour des Google Glass ont donné une importance au produit qui risque en cas d’échec de lourdement se retourner contre l’image d’innovateur de Google. Il ne reste donc plus qu’à tout tenter pour redonner un nouveau lustre au concept, ce simple effort prouvant en soi que celui-ci ne séduit pas par lui-même, sans même parler de l’enthousiasme qu’il aurait déjà fallu communiquer aux millions d’acheteurs potentiels.