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Prospective

L’ICANN remet le point sur son i

MacPlus

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Stuart Lynn, président de l’ICANN, n’a pas peur de mouiller sa chemise. Dans un document sobrement intitulé “Lynn Plan”, il reconnaît en effet sans ambages que l’organisme “ne fonctionnait pas sous sa forme actuelle”, et appelle à “une réforme structurelle profonde et significative”. Selon lui, “le concept d’un corps sectoriel purement privé, basé sur le consensus et l’assentiment, pour gérer le système des noms de domaines, s’est révélé impraticable”, pour citer ZDnet. La solution : “remplacer la structure instable de l’ICANN par un réel partenariat public / privé, enraciné dans le secteur privé mais avec le soutien et la participation des gouvernements nationaux”.


ICANN : je peux

L’engagement courageux de son président tend à montrer que l’organisme est capable d’assumer son indépendance, en professionnalisant rigoureusement son action. Or, si 35 gouvernements ou organismes gouvernementaux disposent de leur conseil au sein de l’ICANN, c’est jusqu’à présent le US Department of Commerce qui assurait l’intendance, c’est à dire la gestion de l’annuaire IP d’Internet. Même si ce rôle diminue graduellement, se défend-t’on du côté de l’institution californienne. L’on y envisage même le dit document comme base à la consultation des internautes, afin d’éclairer dans sa décision de l’accepter ou pas le Department of Trade and Industry, ce coup-ci. Vous n’y comprenez rien, c’est ça ? Ne vous inquiétez pas, il y a de quoi.

Alors disons qu’il était une fois, dans un monde où on aurait inventé Internet pour partager le savoir de l’humanité avec la Terre entière, une bande de joyeux drilles qui durent bien inventer un système pour qu’on s’y retrouve entre tous ces ordinateurs connectés simultanément. Plus soucieux de principes démocratiques que de tickets de caisse, l’organisme qu’ils fondent alors entend associer tous les partenaires à leurs décisions, y-compris les gouvernement, dont l’un, moderniste et généreux, met opportunément à disposition une caisse enregistreuse. Jusque là, tout va bien.

Mais paf, accident de Président, dans un beau pays dont toute ressemblance avec un pays existant reste à prouver. Toujours est-il que il était une autre fois le monde change et vire au Doom-like. Si on n’y montre pas patte blanche, c’est couloirs jusqu’à en crever. Jugulaire jugulaire, et pas un droit de l’homme qui dépasse. Pognon Patrie et Dieu comme triangle des Bermudes. Jusque là, tout bien.

Mais nos joyeux drilles, qui eux étaient resté dans l’ancien monde d’avant, ce qui est très simple à comprendre grâce aux univers parallèles car on baigne en pleine science-fiction, ces joyeux drilles, donc, donc. Hé, quand ça devient mal vu d’être joyeux, un drille plus personne ne sait à quoi ça sert, ce qui leur procure une espèce de voie de disparition. Là, bien…

Le prix du danger

Si malgré cela vous n’y voyez pas plus clair, écoutez donc Monsieur Michael Froomkin, professeur de droit à l’université de Miami, lui semble avoir parfaitement saisi. Il le fait savoir dans une lettre ouverte en réponse aux propositions de Lynn. L’un des aspects les plus remarquables de ce plan est “qu’il enlèverait le moindre contrôle externe sur l’ICANN, que ce soit d’un point de vue technique (les serveurs-source), politique (autonomie des TLD[[Top Level Domain]], interne (le Independant Review Panel que le Dr Lynn a mis un an à organiser et qui n’est toujours pas achevé), légal (le veto du Department of Commerce) judiciaire (pas de membres curieux qui pourraient clamer leurs droits), électoral, ou financier”. Il note égalemnent que ce plan induit l’idée l’ICANN doit en finir avec un fonctionnement consensuel, qui ne marche pas. “Une fois que les gouvernements auront fait pressions sur les acteurs majeurs pour qu’ils contratent des obligations auprès de l’ICANN, la nouvelle, puissante, ICANN, sera un régulateur coercitif de haut en bas”.

Alors, prophète, Cassandre, ou simple analyste avisé, ses inquiétudes méritent d’être écoutées, d’autant que le Lynn Plan est entré en phase d’application. par l’éviction pure et simple au Conseil d’Administration des cinq élus d’internautes, et leur remplacement par des professionnels d ela représentation publique. Le ton est donné, la chasse aux sorcières et aux utopies lancée, et le Président Lynn y joue plus que sa place : c’est la disparition pure et simple de l’ICANN qui pourrait bien sanctionner un échec, c’est à dire l’insatisfaction des politiques et de leurs amis. Et le joyeux drilles ont beau être choqués, il ne leur reste plus qu’à panser leurs blessures et se préparer pour tenter de conserver le .org, dans ce qui sera peut-être la dernière bataille d’un Internet certes ouvert au commerce, mais également à toutes les libertés, sous une responsabilité collective.

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